Clôture définitive d'Hendiadyn.

Publié le par hendiadyn

Que vous dire ?

Tout ce qui faisait que j’étais moi a totalement disparu à présent.

Je ne sais pas comment appeler ça. Poisse. Malchance. Guignon. Mauvais karma. Egregor. Chaque jour depuis cinq ans je crois le combattre, je pense l’épuiser. Je n’imaginais pas que la foudre puisse tomber tant de fois au même endroit. Je ne pensais pas que les faibles bases rebâties depuis peu pouvaient s’écrouler.

Je me suis menti. J’ai cru qu’en niant tout je passerais outre. Qu’en m’acharnant contre vents et marées je triompherais, encore, tant bien que mal, d’une année où rien n’est prévisible et où l’humanité se cache de plus en plus.

J’aime profondément la littérature. Aujourd’hui je n’en suis pas digne car je ne peux plus me concentrer plus de 30 minutes sur un texte. La beauté des choses m’échappe et tout a tendance à se transformer en des ténèbres profondes.

Il faisait déjà bien sombre ici avant, mais depuis le 31 janvier, depuis cet appel tard, depuis le dernier coup, il fait nuit. Ce n’est pas sa faute, ce n’est la faute de personne. Je n’avais encore jamais vu la mort de si près, elle m’a glacée jusqu’au fond des os.

Mes jambes ne me portent plus. J’ai l’impression d’être une noyée rappelée à la surface de temps en temps, juste pour entretenir un petit quart de vie, mais j’étouffe constamment, toujours plus. Je ne peux plus faire semblant comme je l’ai beaucoup fait. Je ne peux plus continuer cet acte grotesque qui n’est pas moi. J’étais une petite fille joyeuse, pouvez-vous croire ça ?

Quand j’ai dû épeler une énième fois mon nom, celui qu’il m’a donné, pour qu’on l’écrive sur le papier orange immonde du constat de décès, quand le policier l’a dit, sur le répondeur, quand on m’a appelée par ce nom qui a suscité tant d’erreurs et tant de sourires, je me suis effondrée. Puis, quand j’ai composé le code de la chambre funéraire et que mon visage a rencontré le mien, je me suis brisée. D’habitude je parviens à récupérer les morceaux ici et là, à reconstruire quelque chose qui fonctionne, mais là, c’était impossible. Je me suis tue. Ma gorge, lentement, a éraillé tout son pouvant provenir de moi. Je suis restée aphone plusieurs jours et puis dans ma tête, le silence.

Je ne peux pas reprendre simplement où j’en étais avant ça. Je savais au fond de moi que cette fois, on avait pressé le bouton stop. Pas le stop de la mort, de ma mort, mais celui d’une urgence d’arrêter cette existence où je ne fais que me mentir, que prendre sur moi et encaisser les aléas d’un quotidien déjà complexe qui me menaient droit dans le mur.

Je ne sais pas si l’on peut guérir de ça, de ce qui me ronge depuis ces années, depuis cette nuit-là. Ce n’est pas dans le passé que je pourrais trouver une réponse. Voilà pourquoi je mets fin à ce blog qui a représenté beaucoup autrefois. Ce n’est plus la personne que je suis aujourd’hui. Peut-être en naîtra-t-il un autre, si d’aventure un jour je renais moi-même. Merci infiniment aux 10 000 et quelques visiteurs qui ont pris le temps de venir se perdre ici toutes ces années. Peut-être nous recroiserons-nous, autre part, mais soyez rassurés, nous ne nous reconnaîtrons pas.

Pour l’instant je n’ai besoin que de silence et de tendresse, en parts mesurées.

Prenez soin de vous, et merci encore.

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