L'amour est très surestimé - Brigitte Giraud (2007)

Publié le par hendiadyn

brigitte giraud bis« Lui, sans doute vous l'aimez, mais c'est la même scène répétée chaque jour qui vous indispose. Il ne s'agit pas de tout mélanger. Vous éprouvez de la tendresse pour lui. C'est ce qu'on dit paraît-il quand on aime plus. Plus on éprouve de la tendresse et moins on aime alors ? La tendresse c'est quand on a plus de désir. On se caresse la joue avant de s'endormir. C'est Pimprenelle et Nicolas. » (La Fin de l’Histoire, page 8, éditions J’ai Lu)


Difficile de commenter un livre qui ne se termine pas. Il ne commence pas réellement non plus, à vrai dire. L’amour est très surestimé est un recueil de onze nouvelles qui fragmente la rupture amoureuse – l’ennui, le veuvage, l’annonce aux enfants, le retrait des affaires, le changement d’appartement. Fragments qui finissent par se rassembler et se ressembler pour ne faire qu’un à la fin. Et si, au fond, il s’agissait de la même rupture, encore et toujours racontée de façons éternellement différentes ?


L’amour est très surestimé n’a d’égal que son titre : oui, il est surestimé, car en le lisant le lecteur sent certes ces troubles de la poitrine, ces battements arrachés ou cette mélancolie fulgurante à l’approche du soir, cependant le ton monotone des dialogues ou des pensées poussent souvent à passer des lignes. Certes nos pensées ressemblent à ces jeux d’encres, ils ne sont pas plus glorieux, pas plus lumineux. Chacun s’est déjà demandé ce que l’autre emporterait sur son passage. (le vase, les livres les plus récents, ou bien les souvenirs communs ?) Mais chacun ne le fait pas en ces termes. Malheureusement, ces nouvelles ont un style trop simpliste – trop terre à terre, qui ne fait pas chuter comme l’on pourrait s’y attendre mais qui ne percute pas assez pour être ressenti.


Le recueil est en réalité l’histoire d’une langueur, d’une immense tristesse qui s’insinue à travers les pages et les chapitres. Ces nouvelles sont les éclats d’un quotidien mis en déroute, rien de plus. Certes, comme le dit la quatrième de couverture, il s’agit d’un livre débarrassé des « artifices de la fiction » ; cependant le niveau de réalité semble trop trivial pour être sublimé par ces phrases directement sorties de l’esprit torturé.


Quelques réticences également pour les pronoms (qui est ce « vous » impersonnel qui peuple tous les romans / témoignages, enjoignant le lecteur à partager une expérience presque trop empathique avec le narrateur ? D’où nous espionnent-ils ?) qui éclatent en première personne du pluriel, puis en je, pour finir sur un tu qui rassure. Une lumière sombre dans « les Veuves » ; qui décrit parfaitement – et cette fois avec une justesse paradoxalement mesurée – l’existence manquante de ces femmes sans moitié, jusqu’à l’éternel recommencement du mariage. Oui, au fond, tout n’est que la même histoire qui se répète.



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